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 Sur les traces de Jeanne d'Arc

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3 participants
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OmbreBlanche

OmbreBlanche


Masculin Nombre de messages : 11154
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Sur les traces de Jeanne d'Arc Empty
MessageSujet: Sur les traces de Jeanne d'Arc   Sur les traces de Jeanne d'Arc Empty10/11/2011, 18:38

> Jeanne d'Arc n'a cessé de fasciner les cinéastes. Que l'on songe seulement à la Passion de Jeanne d'Arc, de Dreyer, ou au Procès de Jeanne d'Arc, de Bresson. A son tour, Philippe Ramos a voulu, "tel un peintre qui travaille sur un motif classique", raconter sa Jeanne, une Jeanne placée sous le signe de l'abandon, thème qui lui est cher. Et ainsi "apporter sa pierre à un édifice plus vaste" qui au fil des œuvres dessinerait un portrait de cette figure mythique.

Citation :
Sur les traces de Jeanne d'Arc 21784_jeanne-d-arc-jpg-500x630-q95_440x260

Philippe Ramos met en scène Jeanne d'Arc

http://www.lavie.fr/culture/cinema/philippe-ramos-met-en-scene-jeanne-d-arc-10-11-2011-21784_35.php

Jeanne Captive s'ouvre de manière surprenante sur une Jeanne qui saute du haut d'un donjon. Une Jeanne qui se suicide ?

Si j'ouvre sur cette scène du saut, ce n'est pas par provocation. C'est pour des raisons esthétiques et dramaturgiques. C'est pour poser la question de la fragilité d'un être humain, aussi héroïque ou extraordinaire soit-il.
Les historiens eux-mêmes s'interrogent sur ce "saut de Beaurevoir" et selon les sources parlent d'une chute de 12 à 20 mètres. Dans les minutes de son procès, Jeanne affirme avoir essayé de s'évader pour sauver les gens de Compiègne et être tombée lors de cette tentative. En même temps, elle se contredit, car elle dit avoir demandé pardon à ses voix d'avoir sauté
.

Dans mon film, Jeanne saute mais elle plane dans le ciel, suspendue dans l'espace. Même si c'est un acte désespéré, je ne le filme pas comme une défenestration. Derrière cette scène, je mets une musique de Bach qui est pour moi la grâce par excellence, et c'est donc comme si cette musique la recueillait. Bien sûr, Jeanne dit ensuite : "Je pensais qu'il y aurait mes anges... Je n'ai trouvé que le vide." Et ça l'interpelle. Finalement, le film n'est qu'une prolongation de sa chute, car c'est hélas là où elle va arriver... Mais entre-temps elle aura cheminé, retrouvé ses voix, et le film se termine dans une forme de sérénité, de paix avec son Dieu.

Autre surprise, cette Jeanne que vous filmez est emmurée dans son silence...

Après sa chute, Jeanne est restée alitée 4 à 5 jours, et surtout silencieuse. Ce contraste entre la Jeanne bavarde, prophétesse et la Jeanne silencieuse, seule face à Dieu comme un ermite, m'a fasciné. Je me suis interrogé sur le sens de son mutisme. Et j'ai émis une hypothèse de poète ou simplement poétique : et si, à la suite de ce saut, son Dieu la mettait à l'épreuve et faisait taire ses voix ? Dramatiquement, il me semblait également intéressant que ce silence voulu par Dieu, elle l'impose à son tour aux hommes. Et par ricochet au public. Ce silence questionne et dérange. Le spectateur espère une Jeanne en bataille, une Jeanne glorieuse, mais je ne lui donne pas ce dont il a envie. Mon travail, c'est précisément d'ouvrir des fenêtres et de faire en sorte que le spectateur s'interroge.

L'art roman a-t-il été une source d'inspiration ?

Oui, je me suis inspiré de l'art de la fin du XIVe siècle, début XVe. Avant de réaliser mon film, j'ai besoin de me nourrir, c'est presque physique, comme un voyage préalable qui m'imprègne. Mais le tournage venu, j'oublie ce que j'ai vécu.
Je me sens très proche d'un sculpteur à qui ont doit un chapiteau d'Autun. On y voit Eve allongée dans des feuillages. Cette image m'a fait rêver la fin du film, avec cette jeune fille nue au milieu des branchages.
J'aime l'art roman car c'est un art organique, presque ludique, plus sensuel, plus palpable que le gothique et qui s'adresse d'une manière plus directe et plus douce à la foule des croyants.
J'aime aussi l'idée de ces ateliers dirigés par des artistes anonymes qui s'effacent derrière leur œuvre, faisant ainsi don de leur travail.
La dernière scène est magnifique, cet espèce de rituel païen alors que les Anglais viennent de jeter les cendres de Jeanne dans le fleuve....
Jeanne vient de disparaître horriblement et il reste dix minutes de film. Là aussi, je mets à mal le spectateur, d'ailleurs pendant les projections beaucoup de gens reprennent leur respiration : "Mon Dieu, mon Dieu, où est mon personnage ?"
Tous les films sur Jeanne se terminent avec le bûcher. Robert Bresson finit magistralement sur la fumée, deux colombes qui se posent et s'envolent.

Historiquement, les cendres de Jeanne ont été jetées dans la Seine depuis un pont de Rouen. Je suis étonné qu'aucun cinéaste n'ait filmé ce moment d'une grande portée symbolique avec le fleuve, l'horizon... C'est pour elle comme un retour à la terre, même si j'imagine que ce fut un traumatisme immense pour elle de savoir qu'elle ne serait pas enterrée.
Mais du coup, à travers cette scène, je lui redonne une sépulture. J'avais envie de la sortir du bûcher, de la ramener vers une forme de grâce, par amour pour elle, pour ce personnage extraordinaire
.