Ironie du sort, le pays où est né le micro-crédit est le théâtre de drames à cause du micro-crédit. Ces derniers mois, plusieurs paysans en situation de surendettement se sont donnés la mort. Un Etat est plus touché que les autres.
Le prix Nobel de la paix, Mohammad Yunus, l'inventeur du micro-crédit l'admet lui aussi : "Il faut mettre de l'ordre dans le micro-crédit" avant d'ajouter dans une interview donnée au journal français La Croix : "Le micro-crédit ne doit pas être présenté comme une opportunité pour gagner de l'argent. Il doit d'abord servir à créer de l'activité, à permettre aux plus démunis d'avoir un métier". Car si de nombreuses agences de prêt se targuent d'avoir une vocation d'aide et se disent solidaires, dans les faits, les agents de recouvrement sont souvent accusés de harceler les emprunteurs. Dans l'Etat de l'Andhra Pradesh, au Sud de l'Inde, les taux d'intérêts avoisinent parfois les 36%. Ces derniers mois, une cinquantaine de paysans croulant sous les dettes se sont suicidés dans cet État.
Une loi pour encadrer le secteur de la micro-finance
Avec 2 milliards de dollars, l'Etat de l'Andhra Pradesh représente à lui seul 30% de la totalité des micro-crédits alloués dans le pays. Un marché porteur pour les 270 institutions de micro-finance (IMF) enregistrées dans l’État. Parmi ces IMF se trouvent des ONG, des coopératives, des banques rurales et même une société cotée en bourse comme SKS, (un acteur majeur du micro-crédit en Inde ayant démarré son activité sous le statut d'organisation à but non lucratif). Mais les "banquiers des pauvres" se montrent de plus en plus insistants et font payer des taux d'intérêts très élevés.
La dérive a été telle que l'Etat de l'Andhra Pradesh a choisi de réglementer le secteur du micro-crédit. Selon le projet de loi, les emprunteurs devront par exemple rembourser leurs prêts dans des bureaux gouvernementaux, ce qui signifie qu'ils ne recevront plus chez eux les percepteurs, accusés d'abus pour collecter les dettes.
L'initiative de l'Andhra Pradesh pourrait aussi donner des idées à la Banque centrale indienne qui devrait intervenir en janvier 2011 pour réguler le marché du micro-crédit. En Inde, le secteur du micro-crédit est très développé. Il existe, dans ce pays de plus de 1,1 milliard d'habitants, plus de 3000 établissements de micro-finance qui prêtent au total plus de sept milliards de dollars à près de 80 millions de clients.