> A partir de 1924-1925, l'économie européenne redécolle, les monnaies retrouvent leur santé, les souvenirs de la Grande Guerre s'estompent et les passions s'atténuent.
En France, la gauche est au pouvoir et elle est animée d'idées conciliantes. Pour elle, le temps est venu de se débarrasser des rancœurs du passé. L'heure est désormais au rapprochement avec l'Allemagne.
Pour le ministre des Affaires étrangères français, Aristide Briand, il est urgent de dépasser les nationalismes et de s'entendre avec les démocrates d'outre-Rhin. Au prix de concessions où sinon une nouvelle guerre recommencera.
Mais Stresemann, lui, est beaucoup plus souple, plus réaliste, et surtout moins idéaliste que son homologue français. Ce qu'il veut, lui, c'est seulement la réintégration de son pays dans le concert des nations. La presse française l'accuse de mauvaise foi, en citant notamment la lettre qu'il adresse au Kronprinz le 7 septembre 1925 où il écrit :
- Citation :
- "L'essentiel est la libération de notre sol, la disparition des troupes d'occupation : il faut d'abord que nos étrangleurs lâchent prise. C'est pourquoi la politique allemande doit pour commencer suivre la formule que Metternich, je crois, adoptait en 1809 : agir en finesse et se dérober aux grandes décisions..."
Plus important encore que le rapprochement entre les deux ennemis d'hier est la signature, en 1928, du pacte Briand-Kellogg :
Signé par la France, les Etats-Unis et 63 autres pays, dont l'URSS, il "déclare la guerre à la guerre".
L'idée ultime est de créer, entre la puissance américaine et la puissance russe, une troisième force continentale : les Etats-Unis d'Europe. Briand pense qu'entre des peuples groupés géographiquement il doit exister un lien fédéral ou sinon, disait-il, "
tout est foutu".
Son idée s'inspire du projet du comte Courdenhove-Kalergi qui, en 1926, avait imaginé faire de l'Europe une confédération avec une cour de justice, fondée sur une alliance militaire étroite, protégeant le droit des minorités et établissant une véritable union douanière et économique.
Briand exposa l'idée en septembre 1929 puis en juin 1930 mais sans trop y croire lui-même. Et effectivement, l'accueil réservé fut partout indifférent ou carrément hostile. Un quotidien allemand, la Deutsche Allegemeine Zeitung, parla même de rémanence de vieil impérialisme français sur fond d'espéranto harmonieux.
Quelques mois plus tard, éclatait la crise économique et plus personne ne parla de ce projet.
Peut-être était-ce encore trop tôt ?
Les nations, plongées dans la crise, se refermèrent sur elles-mêmes égoïstement. Stresemann mourut en octobre 1929, Foch peu de temps après et Clémenceau un peu avant. Toute une génération ayant connu les affres de la guerre et qui aurait pu porter ces espérances de paix et de renouveau quitta la scène.
Briand, l'apôtre de la paix, disparaît lui-même en 1932. Il aura, hélas, survécu assez longtemps pour voir la ruine de tous ses efforts...