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Sacré farceur d'
Ungern il oblige par ses questionnements d'actualité de paisibles juristes
appliqués soit à conclure une formidable fin de Carnaval 2012 soit à abandonner une
conclusion en cours avé une Suzon ou une Béa ou une ou Kyo ou toute espèce du genre
isolée ou en réunion, afin de dégager du temps pour se replonger dans les textes en vigueur
d'un droit applicable aux gens de mer, une discipline juridique étrange, complexe, mouvante,
en permanente réactualisation de sa jurisprudence arbitrale et non unifiée au plan
international. OUF !
Le règlement des différends entre gens de la mer est un droit à la fois public, pénal, privé,
international, national, conventionnel, judiciaire et arbitral. Allez donc vous y retrouver,
d'autant que les sources de ce que l'on appelle le Droit maritime, qui est international, à
distinguer du Droit de la mer qui est national, sont des sources relevant de conférences
internationales qui n'engagent que les parties ayant ratifié la convention ou celles qui y
adhèrent sans les ratifier en s'engageant à en respecter les stipulations (stipulations car
c'est un droit conventionnel et non pas édictions comme c'est le cas de la Loi nationale
par opposition au règlement qui fixe la manière dont la Loi doit être entendue et appliquée).
Pour notre affaire du
Costa Allegra l'indemnisation de l'assistance relève
-
primo de la
Convention Internationale pour l’unification de certaines règles en
matière d’assistance et de sauvetage maritimes conclue à Bruxelles le 23 septembre
1910 et ratifiée par l'Italie le 2 juin 1913 ;
-
secundo de
Convention internationale de 1989 sur l’assistance conclue à Londres
le 28 avril 1989 et ratifiée par l'Italie le 14 juillet 1995 pour être appliquée par elle
le 14 juillet 1996.
La Convention de Londres actualise les stipulations de la Convention de Bruxelles
de 1910 eu égard à l'évolution du commerce international en 80 ans.
En 1910 a été posée la règle dite 'No Cure, No Pay" ce qui signifie que si l'assistance
reste sans résultat pour le navire en détresse celui qui entreprend le sauvetage n'est
pas rémunéré. Elle pose ainsi du coup le principe qu'une rémunération est due au sauveteur.
La Convention de Londres est plus détaillée et explicite. Elle reprend le principe
"No Cure, No pay" et ses articles 12 et 13 que je reproduis ci-dessous organisent les
conditions de rémunération de l'assistance que le juge - étatique ou arbitral - peut
prendre en considération :
- Citation :
Chapitre III Droits des assistants
< Art. 11 Coopération
> Art. 13 Critères d’évaluation de la rémunération
Art. 12 Conditions ouvrant droit à une rémunération
1. Les opérations d’assistance qui ont eu un résultat utile donnent droit
à une rémunération.
2. Sauf disposition contraire, aucun paiement n’est dû en vertu de la présente
Convention si les opérations d’assistance n’ont pas eu de résultat utile.
3. Les dispositions du présent chapitre s’appliquent même si le navire
assisté et le navire assistant appartiennent au même propriétaire.
Art. 13 Critères d’évaluation de la rémunération
1. La rémunération est fixée en vue d’encourager les opérations
d’assistance compte tenu des critères suivants, sans égard à l’ordre
dans lequel ils sont présentés ci-dessous:
a) la valeur du navire et des autres biens sauvés;
b) l’habileté et les efforts des assistants pour prévenir ou limiter les dommages
à l’environnement;
c) l’étendue du succès obtenu par l’assistant;
d) la nature et l’importance du danger;
e) l’habileté et les efforts des assistants pour sauver le navire, les autres biens et
les vies humaines;
f) le temps passé, les dépenses effectuées et les pertes subies par les assistants;
g) le risque de responsabilité et les autres risques courus par les assistants
ou leur matériel;
h) la promptitude des services rendus;
i) la disponibilité et l’usage de navires ou d’autres matériels destinés aux opérations
d’assistance;
j) l’état de préparation ainsi que l’efficacité et la valeur du matériel de l’assistant.
2. Le paiement d’une rémunération fixée conformément au par. 1 doit être effectué par
toutes les parties intéressées au navire et aux autres biens sauvés en proportion de leur
valeur respective. Toutefois, un Etat Partie peut prévoir, dans sa législation nationale, que
le paiement d’une rémunération doit être effectué par l’une des parties intéressées, étant
entendu que cette partie a un droit de recours contre les autres parties pour leur part
respective. Aucune disposition du présent article ne porte préjudice à l’exercice de tout
droit de défense.
3. Les rémunérations, à l’exclusion de tous intérêts et frais juridiques récupérables
qui peuvent être dus à cet égard, ne dépassent pas la valeur du navire et des
autres biens sauvés.
La grande nouveauté de la Convention de Londres tient en ce qu'elle prend en
considération le critère de la préservation de l'environnement ( art.14). Ainsi une
indemnisation dite spéciale peut être exigé par le sauveteur si celui-ci de par sa
contribution a permis d'éviter un dommage à l'environnement. La demande d'une
rémunération spéciale n'a de sens que si elle est supérieure à la rémunération
"normale". C'est une forme de bonus.
Voici cet article 14 :
- Citation :
Art. 14 Indemnité spéciale
1. Si l’assistant a effectué des opérations d’assistance à l’égard d’un navire qui
par lui-même ou par sa cargaison menaçait de causer des dommages à l’environnement
et n’a pu obtenir en vertu de l’art. 13 une rémunération équivalant au moins à l’indemnité
spéciale calculée conformément au présent article, il a droit de la part du propriétaire
du navire à une indemnité spéciale équivalant à ses dépenses telles qu’ici définies.
2. Si, dans les circonstances énoncées au par. 1, l’assistant a prévenu ou limité
les dommages à l’environnement par ses opérations d’assistance, l’indemnité spéciale
due par le propriétaire à l’assistant en vertu du paragraphe 1 peut être augmentée
jusqu’à un maximum de 30 % des dépenses engagées par l’assistant. Toutefois, si
le tribunal le juge équitable et juste, compte tenu des critères pertinents énoncés
au par. 1 de l’art. 13, il peut encore augmenter cette indemnité spéciale, mais
l’augmentation totale ne doit en aucun cas représenter plus de 100 % des d
épenses engagées par l’assistant.
3. Les dépenses de l’assistant visent, aux fins des par. 1 et 2, les débours raisonnablement
engagés par l’assistant dans les opérations d’assistance ainsi qu’une somme équitable
pour le matériel et le personnel effectivement et raisonnablement utilisés dans les
opérations d’assistance, compte tenu des critères énoncés aux al. h), i) et j) du
par. 1 de l’art. 13.
4. L’indemnité totale visée au présent article n’est payée que dans le cas et dans
la mesure où elle excède la rémunération pouvant être obtenue par l’assistant en
vertu de l’art. 13.
5. Si l’assistant a été négligent et n’a pu, de ce fait, prévenir ou limiter les dommages
à l’environnement, il peut être privé de la totalité ou d’une partie de toute indemnité
spéciale due en vertu du présent article.
6. Aucune disposition du présent article ne porte atteinte aux droits de recours
du propriétaire du navire.
Remarque importante : les assurances sont invitées au festin. D'habitude ce sont elles
qui sont "à la manœuvre". Ça peut changer complètement la donne telle qu'elle relève
des simples conventions citées et de la jurisprudence du juge compétent.
Je laisse donc celles et ceux que le sujet intéresse aux prises avé les supputations
d'indemnisations normalement exigibles par le propriétaire du thonier qui a
remorqué le
Costa Allegra.
Il est tôt, bonne nuit.