Canal de Suez - Canal de Panama - Canal de Nicaragua

1 -

A propos du canal du Panama son financement a tourné en une carabistouille qui fit vaciller la jeune  IIIème République. Voici un rapide survol de ce scandale :

“ La plus grande flibusterie du siècle… de l’or, de la boue et du sang ”, a écrit dès septembre Edouard Drumont dans La Libre Parole à propos de l’affaire de Panama. Dans la nuit du 19 au 20 novembre, le baron Reinach, qui fut un intermédiaire entre la Compagnie de Panama et le monde politique, s’est suicidé. Sa mort met le feu aux poudres. En ce jour la presse dénonce les “ chéquards ” et les “ panamistes ”, dont Clemenceau, parmi d’autres, fait partie ; à la tribune de la Chambre des députés, le royaliste Jules Delahaye dénonce sans les nommer 150 députés d’avoir été achetés dans l’affaire de Panama. En septembre 1881, Ferdinand de Lesseps a créé une compagnie pour réaliser le percement de l’isthme qui, à Panama, en Amérique centrale, sépare l’océan Atlantique de l’océan Pacifique. Les difficultés rencontrées lors du percement ont contraint Lesseps à faire appel à de nouveaux fonds. La corruption de députés et de ministres permet à Lesseps d’obtenir un vote favorable pour lancer un emprunt qui l’autorise à rentrer sur le marché des obligations. 85 000 petits porteurs ont souscrit. Malgré cet apport, en février 1889, la société a été mise en liquidation. Les petits épargnants se retrouvent pour la plupart ruinés. Tout a été fait alors pour étouffer l’affaire. L’instruction s’est enlisée pendant des mois, des années. Le suicide de Reinach* contraint (enfin) le monde politique à constituer une commission d’enquête. Le régime parlementaire est atteint…
(Ancien sujet du baccalauréat, probablement impossible à soumettre à la sagacité des futurs lycéens najatisés)

* il est admis qu'il s'agissait vraisemblablement d'un "suicide assisté"...

A retenir que l'ambiance anti judaïque qui se trouva renforcée par les deux petits mécanos du montage 
financier Rainach et Herz est contributive de la flambée antisémite exarcerbée par l'affaire Dreyfus qui éclata en 1894.

Inspiré par ce scandale et celui de l’Union Générale de 1883, Emile ZOLA écrira avec justesse dans son
 roman « L’Argent » en 1891 :

« Violemment, faites flamber un rêve à l'horizon, promettez qu'avec un sou on en gagnera cent, offrez à tous ces endormis de se mettre à la chasse de l'impossible, des millions conquis en deux heures, au milieu des plus effroyables casse-cou ; et la course commence, les énergies sont décuplées. »


« Alors, dans ce milieu exaspéré, mûr pour toutes les folies, tout achève d'enfiévrer les plus sages. Des humbles logis aux hôtels aristocratiques, de la loge des concierges au salon des duchesses, les têtes prennent feu, l'engouement tourne à la foi aveugle, héroïque et batailleuse. On énumère les grandes choses déjà faites : déjà un large ensemble de créations prospères donnant une base solide aux opérations futures et l'avenir qui s'ouvre devant les imaginations surchauffées. Là, le champ des bruits de Bourse et de salons est sans limite. »


« (Mais) la déroute est fatale, Le jour du massacre viendra, où il y aura des morts à manger, des titres à ramasser pour rien dans la boue et dans le sang. L'épidémie périodique, dont les ravages balaient le marché tous les dix à quinze ans, les vendredis noirs, ainsi qu'on les nomme, semant le sol de décombres. Il faut des années pour que la confiance renaisse, pour que les grandes maisons de banque se reconstruisent, jusqu'au jour où, la passion du jeu ravivée peu à peu, flambant et recommençant, l'aventure amène une nouvelle crise, effondre tout, dans un nouveau désastre.»

Je vous invite, si vous ne l'avez fait, à lire l'ouvrage de Zola, 18ème volume de la somme 
des Rougon-Macquart. La description du krach boursier est saisissante.

4 -

kalawasa de Contribuables associés a écrit:

(...)
Rien n'a changé depuis . Je me rappelle que, sous Mitterrand, les percepteurs avaient instruction
d'"encourager" les contribuables à investir dans le Tunnel sous la Manche, en leur faisant comprendre
qu'un refus pourrait être mal perçu...Vous avez compris !

Cher Kalawasa l'épisode que vous évoquez me remet en mémoire une anecdote de la même veine
que m'avait racontée un de mes professeurs de droit commercial, un utopiste communiste convaincu et qui
plus tard me contera sa dépression et son écœurement de s'être fourvoyé quand l'URSS s'effondra.

Il me dit que sous le Déplumé du Dabe prédecesseur du Florantin de Jarnac, lui et des collègues
universitaires connus comme notoirement ancrés à gauche et capitalosceptiques et septiques avaient été
approchés par la direction de l'Ecole nationale des impôts de Clermont-Ferrand pour y être titulaires de
chaire ou chargés de cours ou conférenciers.

L'idée était de trouver des enseignants capables d'insuffler aux futurs inspecteurs des impôts une
circonspection voire de l'hostilité à l'endroit des contribuables les plus aisés et les chefs d'entreprise afin
d'accroître la productivité des redressements fiscaux et la traque des fraudeurs (présumés ou putatifs) à
l'impôt.

Il s'agissait de jouer sur l'antagonisme de classe viscéral entre marxistes ou collectivistes et
tenants du capitalisme et de la finance.

Ainsi toute une génération de limiers du ministère de Taxmanie a été lancée à l'assaut des gens du
showbiz, des banques d'affaires non étatisées, des milieux de l'art, de l'entreprise privé, des professions
libérales, des héritiers, des cadres supérieurs du privé. Ces zélés traqueurs sont à la retraite aujourd'hui,
mais on leur doit nos exilés fiscaux en Helvétie tels un chanteur d'origine arménienne et un acteur
de ciné parlant de lui à la troisième personne entre autres persécutés célèbres!
 
La même politique de recrutement visant les mêmes objectifs avaient été assignée aux établissements de
formation des agents de la Douane (qui en France s'écrit au pluriel)...

D'ailleurs pour montrer du doigt les patrons et cadres d'entreprise bénéficiant d'un véhicule de fonction
un décret fut pris qui imposa qu'ils placent sur le pare-brise un autocollant signalétique, une sorte de
succédané de l'étoile jaune de calamiteuse mémoire. La police de la route alléchée par ce marqueur
d'infamie se faisait un devoir de les arrêter dans les zones proches des frontières au cas où ils auraient
l'idée idiote d'aller planquer un magot à l'étranger ou pour vérifier qu'ils étaient autorisés à utiliser le
véhicule le weekend et les jours fériés; autant dire que l'on les prenait pour des khôns. Les gens ainsi
suspectés étaient signalé aux douanes et les policiers endossaient le statut d'annonceur douanier et
pouvaient être rétribués par cette administration selon une procédure l'on ne peut plus légale... Cette
prime défiscalisée représentait du beurre béni dans les épinards et constituait une solide motivation.

EddieCochran a écrit:

4 -

kalawasa de Contribuables associés a écrit:

(...)
Rien n'a changé depuis . Je me rappelle que, sous Mitterrand, les percepteurs avaient instruction
d'"encourager" les contribuables à investir dans le Tunnel sous la Manche, en leur faisant comprendre
qu'un refus pourrait être mal perçu...Vous avez compris !

Cher Kalawasa l'épisode que vous évoquez me remet en mémoire une anecdote de la même veine
que m'avait racontée un de mes professeurs de droit commercial, un utopiste communiste convaincu et qui
plus tard me contera sa dépression et son écœurement de s'être fourvoyé quand l'URSS s'effondra. (...)

Des propos qui laissent rêveur, tout en nous ramenant à la réalité d'aujourd'hui : des idéologues sectaires s'emparent du pouvoir et nous emprisonnent, nous et notre vie quotidienne, dans leur système de pensée, hier par la ruse discrète, aujourd'hui par une propagande tapageuse omniprésente qui nous fait croire qu'il n'y a pas autre chose...

Rien de neuf sous le soleil.

Chapeau !

Biloulou qui par ses traits d'esprit me coiffe sur le poteau a écrit:

Chapeau !

Bravo, c'est très fin.

EddieCochran a écrit:

Biloulou qui par ses traits d'esprit me coiffe sur le poteau a écrit:

Chapeau !

Bravo, c'est très fin.

Le méprisable vermisseau que je suis rampe de honte à l'idée d'avoir empiété à découvert sur vos rizières....