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La France, disait Michelet,
est une personne".
Partons donc à sa rencontre. Du haut de ses sommets, les horizons se découpent ou s'étalent dans les brumes ou sous le soleil. Le long de ses côtes, les ports, les îles invitent à l'aventure. Parcourir la France, c'est voyager dans son passé et entrer, avec ses industries, ses centrales nucléaires, ses villes nouvelles, dans son avenir. Art et artisanat cohabitent, usines et cathédrales se côtoient; dans les vieux villages où survivent encore quelques traditions, où se maintiennent bon gré mal gré les coutumes d'autrefois, les petites rues aux pavés disjoints rejoignent les routes nationales qui s'embranchent sur les autoroutes. Ainsi se dessine l'immense carte où circule le sang de la France. Le nôtre.
Carte du Tendre aussi, où les souvenirs du passé éveillent ou réchauffent notre cœur. Pas une ville, pas un village, pas une église, pas un château qui n'évoque notre histoire. Découvrir la France, c'est tant aller à la rencontre de ses racines que se dépayser.
Car parcourir la France, c'est passer d'un monde à l'autre.
La France, elle est faite de provinces qui, chacune, ont une âme propre. En traversant l'Hexagone du sud au nord, de l'est à l'ouest, on parcourt des régions si différentes et si contrastées qu'on a bien souvent l'impression de passer d'un monde à un autre.
La mesure de la France est faite de ces oppositions, c'est en cela que réside notre "identité".
On peut citer la farouche Bretagne et ses calvaires de granit, ses manoirs, ses chapelles et son chaos rocheux. Non loin de là, la paisible et fraîche Normandie qui nous offre ses pâturages verdoyants, ses plages de sable ocre et ses ciels nacrés. Suivons ensuite le cours de la paresseuse Loire, dont les châteaux font triompher les grâces raffinées de la Renaissance et, sous le dur soleil de la Provence, pénétrons dans l'ombre rafraichissante des nefs romanes dont la pierre a la couleur du pain cuit.
Des Alpes aux Pyrénées, les paysages que dominent les sommets neigeux seraient presque semblables s'il n'y avait les villages, qui ont, là, de larges toits en pente couverts de lauzes et des galeries de bois, ici des ardoises, des murs pignons à ressauts ou des toits en avancée. Et comment ne pas succomber au charme des citadelles cathares, dont les ruines en nid d'aigle couronnent en majesté des pitons pointus.
Oui, je rêve de ma France. Car je l'aime. J'aime ma France aux multiples visages. Cette France qui s'inscrit dans le temps et dans l'histoire. Depuis les signes mystérieux tracés par les premiers hommes sur les rochers du mont Bego, dans la vallée des Merveilles, aux austères églises romanes d'Auvergne dont les Madones sereines sont images de foi autant que la terrible "Crucifixion" de Colmar.
Terre des Hommes aussi où dans les villages basques, on danse et on joue à la pelote et où dans les villages de l'Artois et de Picardie on promène les Géants. Terre des traditions où aux Baux de Provence on offre l'agneau la nuit de Noël, où devant les pardons de Bretagne on défile en cortèges avec coiffes et bannières et où à Turckheim, en Alsace, le dernier veilleur nocturne passe chaque soir d'été dans les rues en chantant le couvre-feu.
Terre d'histoire enfin ... en pensant à l'Argonne pétrie de sang, au Midi gorgé de soleil, aux plages de l'Océan et de la Méditerranée qui n'évoquent aujourd'hui plus que farniente et joie de vivre, aux énormes agglomérations industrielles du Nord, avec leurs terrils et leurs beffrois, qui nous rappellent à tous la peine des hommes au visage de suie. Celle des laboureurs du Lauragais, des forestiers des Ardennes, des pêcheurs de Concarneau n'est pas moins réelle.