OmbreBlanche
Nombre de messages : 11154 Age : 51 Localisation : Nord Franche-Comté (25) Date d'inscription : 16/11/2008
| Sujet: Discours de la servitude volontaire (La Boétie) 13/2/2011, 02:28 | |
| Comment tant d'hommes et tant de nations peuvent-ils accepter la tyrannie d'un seul sans y être toujours contraints par une force réelle ?
Le pouvoir est parfois une énigme qui révèle la faiblesse même des hommes. - Citation :
- Je désirerais seulement qu'on me fît comprendre comment il se peut que tant d'hommes, tant de villes, tant de nations supportent quelquefois tout d'un Tyran seul, qui n'a de puissance que celle qu'on lui donne, qui n'a de pouvoir de leur nuire, qu'autant qu'ils veulent bien l'endurer, et qui ne pourrait leur faire aucun mal, s'ils n'aimaient mieux tout souffrir de lui que de le contredire. Chose vraiment surprenante (et pourtant si commune, qu'il faut plutôt en gémir que s'en étonner) ! c'est de voir des millions d'hommes misérablement asservis et soumis tête baissée à un joug déplorable, non qu'ils y soient contraints par une force majeure, mais parce qu'ils sont fascinés et, pour ainsi dire, ensorcelés par le seul nom d'un, qu'ils ne devraient redouter, puisqu'il est seul, ni chérir, puisqu'il est, envers eux tous, inhumain et cruel. Telle est pourtant la faiblesse des hommes !
Mais, ô grand Dieu ! qu'est donc cela ! Comment appellerons-nous ce vice, cet horrible vice ? N'est-ce pas honteux de voir un nombre infini d'hommes, non seulement obéir, mais ramper, non pas être gouvernés, mais tyrannisés, n'ayant ni biens, ni parents, ni enfants, ni leur vie même qui soient à eux ? Souffrir les rapines, les brigandages, les cruautés, non d'une armée, non d'une horde de barbares, contre lesquels chacun devrait défendre sa vie au prix de tout son sang, mais d'un seul ; nom d'un Hercule ou d'un Samson, mais d'un vrai hommeau, souvent le plus lâche, le plus vil et le plus efféminé de la nation, qui n'a jamais flairé la poudre des batailles, mais à peine foulé le sable des tournois ; qui est inhabile, non seulement à commander aux hommes, mais aussi à satisfaire la moindre femmelette ! Etienne de La Boétie, Discours de la servitude volontaire. | |
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Invité Invité
| Sujet: Re: Discours de la servitude volontaire (La Boétie) 13/2/2011, 16:07 | |
| Comment appellerons-nous ce vice, cet horrible vice ? N'est-ce pas honteux de voir un nombre infini d'hommes, non seulement obéir, mais ramper, non pas être gouvernés, mais tyrannisés, n'ayant ni biens, ni parents, ni enfants, ni leur vie même qui soient à eux ?
Parce que nous naissons dans la « tyrannie », face à une volonté souveraine qui va, plus ou moins inconsciemment, définir la personne sous son joug : tu seras ce que j'ai besoin que tu deviennes.
On appèle ça la famille et l'éducation primaire. Certains n'en sortent pas eux-mêmes. Prétendront-ils encore avoir vécu « leur » vie.
L'Homme est un animal paradoxal. On lui a greffé une conscience afin de l'investir. Ceci réalisé, il croit avoir tout décidé, fors ce qu'il n'aime pas : c'est la faute de quelqu'un d'autre.
Mais sa naissance était déjà la « faute » de quelqu'un d'autre. |
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