Ungern
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| Sujet: Walaou Akbar : se radicaliser tout seul dans son coin est maintenant possible ! 1/6/2013, 20:09 | |
| Rappel du premier message : - Citation :
- "Inspire", la bible du djihadiste solitaire
Le Monde.fr | 31.05.2013 à 16h52 • Mis à jour le 31.05.2013 à 17h24 Par Hélène Sallon
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De Mohamed Merah, auteur présumé de l'assassinat de sept personnes en France en mars 2012, aux frères Tsarnaev, responsables présumés de l'attentat de Boston en avril 2013, en passant par Michael Adebolajo et son complice qui ont assassiné à coups de couteau de boucher un jeune soldat à Londres, la menace djihadiste tend à s'incarner ces dernières années dans la figure de "loups solitaires". Des petits soldats du djihad mondial autoradicalisés sous l'influence des discours de prédicateurs islamistes radicaux entendus sur Internet. Les forums de discussion et les réseaux sociaux sont devenus un espace de recrutement de nouveaux adeptes et un lieu d'échange privilégié de ressources idéologiques et opérationnelles. Et, dans cette sphère du "djihad électronique", le magazine Inspire est souvent désigné comme l'inspirateur de ces loups solitaires.
Lancé en juillet 2010 par Al-Qaida en péninsule Arabique (AQPA), ce magazine trimestriel a marqué un tournant dans la stratégie de communication et de recrutement d'Al-Qaida. Alors que plusieurs magazines existaient déjà en arabe, Inspire est le premier rédigé en anglais. Sur quelque 70 pages, le magazine égrène des contenus politiques et théologiques, ainsi que des conseils pratiques pour mener le djihad, mis en valeur par un travail d'édition léché, riche en photographies couleur et en infographies.
Diffusé en PDF sécurisé sur des listes de diffusion et des forums spécialisés, Inspire est aisément accessible en ligne et ne cesse de gagner de nouveaux lecteurs. Le nombre de téléchargements est passé de 12 000 en 2011 à 82 000 pour le dernier numéro, paru en mars 2013. Ce numéro 10 a également été retwitté 7 300 fois et mentionné par des internautes 217 000 fois. "Il y a une attente et un intérêt renouvelé à l'approche de la publication d'un nouveau numéro. Quinze jours avant, les internautes en discutent déjà sur les forums. Chacun de ses articles est repris et suscite des thèmes de discussion", commente Mathieu Guidère, islamologue. En fins communicants, ses créateurs font monter la pression quelques jours avant chaque parution.
FER DE LANCE DU DJIHAD ÉLECTRONIQUE
Derrière le concept d'Inspire se profile la personnalité d'Anouar Al-Aulaqi, un imam radical yéménite né aux Etats-Unis, qui fut numéro trois d'AQPA jusqu'à son exécution par un drone américain au Yémen, en octobre 2011. Diplômé en communication et marketing aux Etats-Unis, Al-Aulaqi a introduit un tournant dans la stratégie de communication et de recrutement d'Al-Qaida. "Il a été le premier à lancer le djihad électronique, de façon multilingue et à partir des pays visés", souligne Mathieu Guidère. Avec Inspire, l'accent est mis sur le recrutement en Occident, et plus particulièrement aux Etats-Unis, "pays mécréant" pour la nébuleuse islamiste.
Multipliant les articles sur "la faillite morale" ou "les crimes" de l'Occident, l'objectif est de retourner les apprentis djihadistes contre le système de valeurs dont ils sont issus. "Nous sommes tous des Oussama", titre ainsi le dernier numéro, en référence aux slogans proférés durant les manifestations contre le film anti-islam, L'Innocence des musulmans. Pour répondre à la pénurie de militants recrutés à l'ancienne dans les mosquées, les banlieues ou sur Internet, Al-Aulaqi a en effet théorisé le djihad individuel et émis une fatwa sur "le terrorisme solitaire".
"Dans l'un des numéros d'Inspire, Al-Aulaqi explique que, face à l'efficacité des services de renseignement, face au renforcement du contrôle des djihadistes en Occident, il est devenu trop risqué d'envoyer des combattants en Occident, trop risqué d'activer une cellule ou un réseau et trop compliqué de communiquer avec les chefs et donc, en conséquent, le djihad est devenu individuel", analyse Mathieu Guidère. En quelques numéros, le magazine s'est ainsi taillé une place de choix dans la sphère du djihad, au point d'être "agréé" par Al-Qaida.
LA BIBLE DU DJIHADISTE SOLITAIRE
Chargé du recrutement des terroristes aux Etats-Unis, Al-Aulaqi se présente notamment comme l'inspirateur de l'attentat manqué du Nigérian Omar Farouk Abdulmutallab, 25 ans, sur le vol Amsterdam-Détroit, le 25 décembre 2009. Au fil des numéros, Inspire n'a cessé d'inciter à des actions individuelles de ce type. "C'est vous le terroriste d'à-côté. Votre sang ne sera pas gaspillé", enjoint le magazine. Sous le titre "Une balle par jour tient l'infidèle éloigné pour toujours", les portraits des hommes à abattre s'étalent sur une double page, à l'instar du prêtre américain Terry Jones ou du dessinateur français Charb.
Inspire regorge d'idées simples et de conseils pratiques pour aider les individus isolés à commettre par eux-mêmes des attentats. Chaque numéro déploie ses conseils sur la fabrication des bombes, les meilleures positions de tir ou la façon d'incendier une voiture sur un parking en dix étapes. L'article publié dans la première édition de juillet 2010, et intitulé "Comment fabriquer une bombe dans la cuisine de votre mère", est ainsi devenu l'un des classiques de la littérature djihadiste. Les frères Tsarnaev, auteurs présumés des attentats de Boston, s'en seraient inspiré pour mettre au point leurs bombes dans des Cocotte-Minute. Et, à chaque numéro, sa technique : foncer avec un véhicule dans la foule, faire exploser des immeubles, saboter des autoroutes pour provoquer des accidents. Des méthodes simples qui font parfois les frais, en terme d'efficacité, de l'amateurisme de ceux qui les mettent en œuvre.
UN MAGAZINE QUI S'EST TOURNÉ VERS LA BASE
A la mort d'Anouar Al-Aulaqi en octobre 2011 au Yémen, son équipe a repris le flambeau. "Ses contributeurs sont des personnalités du djihad électronique qui se cachent sous des pseudonymes, des noms de guerre. Ce sont tous des anglophones vivant dans des pays 'mécréants'", explique Mathieu Guidère. Avec cette nouvelle équipe, le magazine a évolué. "Au début, il était davantage tourné vers les interviews de personnalités djihadistes ayant un ascendant sur la nébuleuse, avec qui Al-Aulaqi était en contact. A sa mort, le magazine est devenu plus populaire, plus tourné vers la base", explique Mathieu Guidère.
Cette "popularisation" du titre se traduit notamment par l'ouverture des tribunes à des contributions extérieures et la création de rubriques telles que "le courrier des lecteurs" et, surtout, le "On a testé pour vous". Pour asseoir sa crédibilité, la rédaction se targue désormais de tester toutes les méthodes d'action qu'elle propose à ses lecteurs. Ainsi, dans le dernier numéro, en réponse à un lecteur qui suggérait de disperser des clous sur une autoroute pour provoquer un carambolage, la rédaction a testé et approuvé une méthode bien plus efficace. La technique pour faire exploser une voiture en lui faisant faire des tonneaux est ainsi minutieusement expliquée en graphique.
UN EFFET D'INSPIRATION QUI FAIT DES ÉMULES
Difficile de mesurer l'impact du magazine Inspire sur la radicalisation des apprentis terroristes et le passage à l'acte. "Tout est dit dans le titre : c'est l'effet d'inspiration, que l'on traduit dans le jargon terroriste par l'effet copycat, le mimétisme terroriste. Son influence n'est pas déterminante dans le passage à l'acte d'un djihadiste, mais c'est un déclencheur", estime Mathieu Guidère. Son influence est d'autant plus grande que sa conception et sa diffusion posent des risques limités. "On peut tracer les gens sur Internet mais, à l'heure actuelle, à défaut de consensus, la responsabilité pénale des individus en cas d'incitation à la haine et d'appel au meurtre n'est pas engagée sur Internet comme elle l'est dans le monde réel", indique le chercheur.
Les adeptes d'Inspire ne se trouvent pas uniquement dans la mouvance salafiste. "La mouvance djihadiste aujourd'hui est la plus active et la plus innovante en terme de subversion révolutionnaire. Du coup, ceux qui se considèrent comme révolutionnaires mais n'ont pas les moyens d'innover, s'inspirent d'elle", note Mathieu Guidère. Les lettres piégées envoyées fin 201o par les anarchistes grecs de "Conspiration des cellules de feu" à Nicolas Sarkozy, Angela Merkel et Silvio Berluscioni sont un cas d'école. Leur technique a été directement inspirée des imprimantes piégées envoyées par AQPA, en octobre 2010, via de simples colis UPS et FedEx, à destination des Etats-Unis. Le mouvement s'était targué du coût de l'opération en "une" du numéro 3 : "4 200 dollars".
Le magazine est, en tout cas, considéré comme un outil efficace par les chefs de la mouvance djihadiste mondiale. Des demandes récurrentes sont exprimées pour créer une version francophone en Afrique. Les internautes djihadistes francophones se contentent pour le moment des traductions d'articles partagées par certains "frères" sur les forums de discussion. Jaloux du succès d'Inspire, certains mouvements salafistes djihadistes veulent créer leur propre magazine. Les Tunisiens d'Ansar Al-Charia ont ainsi lancé il y a deux mois le magazine Salafiya, en arabe pour le moment.
Hélène Sallon Déjà que moi je donne de bons conseils .... http://www.lemonde.fr/international/article/2013/05/31/inspire-la-bible-du-djihadiste-solitaire_3421026_3210.html | |
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