Espagne: dévotion et émotion au passage des processions de la semaine sainte Monde -
Europe 8:34 La "dévotion", et un "sentiment inexplicable" poussent Manuel Saldaña, chaque vendredi saint depuis huit ans, à prendre place parmi les 48 porteurs du Christ de la Macarena, qui défile à l'aube dans les rues de Séville, un des moments forts de la semaine sainte.
A Séville (sud), environ 70 processions paradent pendant les 10 jours de fêtes entourant la semaine sainte, dévoilant aux fidèles et aux touristes leurs somptueux "mystères", ces sculptures de bois représentant le Christ avant la crucifixion ou la Vierge Marie.
Mais le moment-clé est la "Madruga", qui dure de jeudi vers minuit à vendredi vers 14H00, et concentre les plus importantes processions de ces festivités très suivies en Espagne.
Le Christ de la Macarena, celui que porte Manuel, pèse 2,5 tonnes, ce qui oblige les porteurs à entretenir une bonne condition physique.
"Pour moi, c'est de l'art", commente sa femme, Agripina, en désignant les "mystères", pouvant dater du XVIIe siècle, entourés de chandeliers d'argents, de tapis de fils d'or.
A cette émotion artistique "s'ajoute la tradition, le fait d'être né ici, la foi, le fait de l'avoir vécu depuis tout petit", selon elle.
Et si on ajoute à cela "la fatigue de toute la nuit, et la musique", les larmes perlent sous de nombreux regards au passage du Christ et de la Vierge.
Des "Olé!", "Macarena, tu es si belle" pleuvent des balcons, avec des pétales de roses. Parfois, l'un de spectateurs pousse une "saeta", chant religieux qui s'achève sous les bravos.
Mais les ovations sont aussi pour les porteurs, les centurions romains et bien sûr les impressionnants pénitents, les "nazarenos", ces personnages coiffés de leur typique capuche conique, héritée de l'Inquisition, véritable image de marque de la semaine sainte espagnole au delà des frontières.
Près de 60.000 de ces pénitents vont défiler, et ceux officiant entre jeudi et vendredi matin ont marché presque toute la nuit.
"Tu termines sur les genoux", admet Manolo Bernardo, 36 ans, dont 24 de défilés dans la procession de "Los Gitanos" (les Gitans).
"Tous les ans, à l'arrivée à la cathédrale je me disais: +c'est fini, je ne ne sors plus+ ou encore +quel besoin ai-je de m'infliger cela?+, mais il y a quelque chose qui te pousse" à continuer, comme le désir de "participer", témoigne-t-il.
"Tu es transporté à une autre époque, c'est unique, cela dure depuis six ou sept siècles et cela continue pratiquement à l'identique", ajoute Carlos Garcia, autre pénitent depuis 30 ans, dont plusieurs dans la fameuse et austère procession du "Silence".
"Ce n'est pas de la religiosité, c'est une tradition, pure et dure", selon lui.
Mais pour la mère de Manuel Saldana, "c'est la foi que je porte dans le Christ et dans la Vierge de la Macarena" qui provoque "une émotion très forte", et qui l'est encore plus au passage de son fils porteur.
A 71 ans, Maria définit sa famille du populaire quartier de la Macarena: Ils sont "très +macareniens+".