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 Introduction à "The White People", par Arthur Machen

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2 participants
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Biloulou

Biloulou


Masculin Nombre de messages : 54566
Localisation : Jardins suspendus sur la Woluwe - Belgique
Date d'inscription : 27/10/2008

machen - Introduction à "The White People", par Arthur Machen Empty
MessageSujet: Introduction à "The White People", par Arthur Machen   machen - Introduction à "The White People", par Arthur Machen Empty22/9/2010, 20:22

Les vrais pécheurs, comme les vrais saints, sont des ascètes. -Le vrai Mal, comme le vrai Bien, n'a rien d voir avec le monde ordinaire. - Le péché, c'est prendre le ciel d'assaut. -Le vrai Mal devient de plus en plus rare. - Le matérialisme, ennemi du Bien et plus encore du Mal. - Il y a tout de même quelque chose aujourd'hui. - Si vous êtes réellement intéressés...

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Ambrose dit : « La sorcellerie et la sainteté, voilà les seules réalités. »
Il poursuivit : « La magie se justifie à travers ses enfants : ils mangent des croûtes de pain et boivent de l'eau avec une joie beaucoup plus intense que celle de l'épicurien.
- Vous voulez parler des saints?
- Oui. Et aussi des pécheurs. Je crois que vous tombez dans l'erreur fréquente de ceux qui limitent le monde spirituel aux régions du bien suprême. Les êtres suprêmement pervers font aussi partie du monde spirituel. L'homme ordinaire, charnel et sensuel, ne sera jamais un grand saint. Ni un grand pécheur. Nous sommes, pour la plupart, simplement des créatures contradictoires et, somme toute, négligeables. Nous suivons notre chemin de boue quotidienne, sans comprendre la signification profonde des choses, et c'est pourquoi le bien et le mal, en nous, sont identiques : occasion, sans importance.
- Vous pensez donc qu'un grand pécheur est un ascète, tout comme le grand saint ?
- Ceux qui sont grands, dans le bien comme dans le mal, sont ceux qui abandonnent les copies imparfaites et vont vers les originaux parfaits. Pour moi, je n'ai aucun doute : les plus hauts d'entre les saints n'ont jamais fait une "bonne action", au sens courant du terme. Et d'un autre côté, il existe des hommes qui sont descendus au fond des abîmes du mal, et qui, dans toute leur vie, n'ont jamais commis ce que vous appelez une "mauvaise action". »

Il quitta la pièce pendant un instant ; Cotgrave se tourna vers son ami et le remercia de l'avoir présenté à Ambrose.
« Il est formidable, dit-il. Je n'ai jamais vu ce genre de cinglé. »
Ambrose revint avec une nouvelle provision de whisky et servit les deux hommes avec générosité. Il critiqua avec férocité la secte des abstinents, mais se versa un verre d'eau. Il allait reprendre son monologue, lorsque Cotgrave l'interrompit :
« Vos paradoxes sont monstrueux. Un homme peut être un grand pécheur et cependant ne jamais rien faire de coupable ? Allons donc!
- Vous vous trompez totalement, dit Ambrose, je ne fais jamais de paradoxes ; je voudrais bien pouvoir en faire. J'ai simplement dit qu'un homme peut être grand connaisseur en vins de Bourgogne et cependant n'avoir jamais goûté à la piquette des bistrots. Voilà tout, et c'est plutôt un truisme qu'un paradoxe, n'est-ce pas ? Votre réaction tient à ce que vous n'avez pas la moindre idée de ce que peut être le péché. Oh, bien sûr, il y a un rapport entre le péché majuscule et les actes considérés comme coupables: meurtre, vol, adultère, etc. Exactement le même rapport qu'entre l'alphabet et la plus géniale poésie. Votre erreur est quasi univer¬selle : vous avez pris, comme tout le monde, l'habitude de regarder les choses à travers des lunettes sociales. Nous pensons tous qu'un homme qui nous fait du mal, à nous, ou à nos voisins, est un homme mauvais. Et il l'est, du point de vue social. Mais ne pouvez-vous comprendre que le Mal, dans son essence, est une chose solitaire, une passion de l'âme? L'assassin moyen, en tant qu'assassin, n'est absolument pas un pécheur au sens vrai du mot. C'est simplement une bête dangereuse dont nous devons nous débarrasser pour sauver notre peau. Je le classerais plutôt parmi les fauves que parmi les pécheurs.
- Tout cela me semble assez étrange.
- Ce ne l'est pas.. L'assassin ne tue pas pour des raisons positives, mais négatives ; il lui manque quelque chose que les non-meurtriers possèdent. Le Mal, par contre, est totalement positif. Mais positif dans le mauvais sens. Et il est rare. Il y a sûrement moins de vrais pécheurs que de saints. Quant à ceux que vous appelez des criminels, ce sont des êtres gênants, bien entendu, et dont la société a raison de se garder, mais entre leurs actes antisociaux et le Mal, il y a une sacrée marge, croyez-moi! »

Il se faisait tard. L'ami qui avait conduit Cotgrave chez Ambrose avait sans doute déjà entendu tout cela. Il écoutait avec un sourire las et un peu narquois, mais Cotgrave commençait à penser que son « aliéné » était peut-être un sage.
« Savez-vous que vous m'intéressez immensément? dit-il. Vous croyez donc que nous ne comprenons pas la vraie nature du mal ?
- Nous le surestimons. Ou bien nous le sous-estimons. D'une part, nous appelons péché les infractions aux règlements de la société, aux tabous sociaux. C'est une absurde exagération. D'autre part, nous attachons une importance si énorme au « péché » qui consiste à mettre la main sur nos biens ou nos femmes, que nous avons tout à fait perdu de vue ce qu'il y a d'horrible dans les vrais péchés.
- Mais qu'est-ce donc, alors, que le péché ? demanda Cotgrave.
- Je suis obligé de répondre à votre question par d'autres questions. Que ressentiriez-vous si votre chat ou votre chien se mettait à vous parler avec une voix humaine? Si les roses de votre jardin se mettaient à chanter ? Si les pierres de la route se mettaient à grossir sous vos yeux ? Eh bien, ces exemples peuvent vous donner une vague idée de ce qu'est réellement le péché.
- Écoutez, dit le troisième homme qui était demeuré jusque-là fort placide, vous semblez tous deux bien partis. Je rentre chez moi. J'ai manqué mon tram et serai obligé de marcher. »

Ambrose et Cotgrave s'installèrent plus profondément dans leurs fauteuils après son départ. Dans la brume qui gelait les vitres du petit matin, la lumière des lampes devenait pâle.
« Vous m'étonnez, dit Cotgrave. Je n'avais jamais pensé à tout cela. S'il en est vraiment ainsi, il faut tout retourner. Alors, selon vous, l'essence du péché serait...
- Vouloir prendre le ciel d'assaut, dit Ambrose. Le péché réside pour moi dans la volonté de pénétrer de manière interdite dans une sphère autre et plus haute. Vous devez donc comprendre pourquoi il est si rare. Peu d'hommes, en vérité, désirent pénétrer dans d'autres sphères, qu'elles soient hautes ou basses, de façon permise ou défendue. Il y a peu de saints. Et les pécheurs, au sens où je l'entends, sont encore plus rares. Et les hommes de génie (qui participent parfois des deux) sont rares, eux aussi... Mais il est peut-être plus difficile de devenir un grand pécheur qu'un grand saint.
- Parce que le péché est profondément contre nature ?
- Exactement. La sainteté exige un aussi grand effort, ou presque, mais c'est un effort qui s'exerce dans des voies qui étaient autrefois naturelles. Il s'agit de retrouver l'extase que connut l'homme avant la chute. Mais le péché est une tentative pour obtenir une extase et un savoir qui ne sont pas, et qui n'ont jamais été donnés à l'homme, et celui qui tente cela devient démon. Je vous ai dit que le simple meurtrier n'est pas nécessairement un pécheur. C'est vrai, mais le pécheur est parfois un meurtrier. Je songe à Gilles de Rais, par exemple. Voyez-vous, si le bien et le mal sont également hors de portée de l'homme d'aujourd'hui, de l'homme ordinaire, social et civilisé, le mal l'est dans un sens bien plus profond encore. Le saint s'efforce de retrouver un don qu'il a perdu ; le pécheur s'efforce vers quelque chose qu'il n'a jamais possédé. Somme toute, il recommence la Chute.
- Êtes-vous catholique ? dit Cotgrave.
- Oui, je suis un membre de l'Église anglicane persécutée.
- Alors, que pensez-vous de ces textes où l'on nomme péché ce que vous classez comme délit sans importance ?
- Notez, s'il vous plaît, que dans ces textes de ma religion, on voit chaque fois paraître le mot "sorcier" qui me paraît le mot clef. Les délits mineurs, qui sont nommés péchés, ne sont nommés ainsi que dans la mesure où c'est le sorcier qui est poursuivi par ma religion derrière l'auteur de ces petits délits. Car les sorciers se servent des défaillances humaines qui résultent de la vie matérielle et sociale, comme instruments pour atteindre leur but infiniment exécrable. Et laissez-moi vous dire ceci : nos sens supérieurs sont si émoussés, nous sommes à ce point saturés de matérialisme, que nous ne reconnaîtrions sûrement pas le vrai mal s'il nous arrivait de le rencontrer.
- Mais est-ce que nous ne ressentirions pas tout de même une certaine horreur? Cette horreur que vous évoquiez tout à l'heure en m'invitant à imaginer des roses qui se mettraient à chanter ?
- Si nous étions des êtres naturels, oui. Les enfants, certaines femmes et les animaux ressentent cette horreur. Mais, chez la plupart d'entre nous, les conven¬tions, la civilisation et l'éducation ont assourdi et obscurci la nature. Parfois nous pouvons reconnaître le mal à sa haine du bien, c'est tout, et c'est purement fortuit. En réalité, tes Hiérarques de l'Enfer passent inaperçus parmi nous.
- Pensez-vous qu'ils soient eux-mêmes inconscients du mal qu'ils incarnent?
- Je le pense. Le vrai mal, dans l'homme, est comme la sainteté et le génie. C'est une extase de l'âme, qui échappe à la conscience. Un homme peut être infiniment, horriblement mauvais et ne jamais le soupçonner. Mais je vous le répète, le mal, au sens véritable du mot, est rare. Je crois même qu'il devient de plus en plus rare.
- J'essaie de vous suivre dit Cotgrave. Vous voulez dire que le Mal véritable est d'une tout autre essence que ce que nous appelons d'habitude le mal ?
- Absolument. Un pauvre type chauffé par l'alcool rentre chez lui et tue à coups de pied sa femme et ses enfants. C'est un meurtrier. Et Gilles de Rais aussi est un meurtrier. Mais vous saisissez le gouffre qui les sépare ? Le mot est accidentellement le même dans chaque cas, mais le sens est totalement différent.
« Il est certain que la même faible ressemblance existe entre tous les péchés "sociaux" et les vrais péchés spirituels, mais il s'agit ici de l'ombre et là de la réalité. Si vous êtes un peu théologien, vous devez comprendre.
- Je vous avoue que je n'ai guère consacré de temps à la théologie, remarqua Cotgrave. Je le regrette, mais, pour revenir à notre sujet, vous pensez que le péché est une chose occulte, secrète ?
- Oui. C'est le miracle infernal, comme la sainteté est le miracle surnaturel. Le vrai péché s'élève à un tel degré que nous ne pouvons absolument pas soupçon¬ner son existence. Il est comme la note la plus basse de l'orgue : si profonde que nul ne l'entend. Parfois il y a des ratages, des retombées, et ils conduisent à l'asile d'aliénés ou à des dénouements plus affreux encore. Mais en aucun cas vous ne devez le confondre avec les méfaits sociaux. Souvenez-vous de l'Apôtre : il parlait de l' "autre côté" et faisait une distinction entre les actions charitables et la charité. Comme on peut tout donner aux pauvres et pourtant manquer de charité, on peut éviter tous les péchés et cependant être une créature du mal.
- Voilà une singulière psychologie! dit Cotgrave, mais je confesse qu'elle me plaît. Je suppose que, selon vous, le véritable pécheur pourrait fort bien passer pour un personnage inoffensif ?
- Certainement. Le Mal véritable n'a rien à voir avec la société: Le Bien non plus, d'ailleurs. Croyez-vous que vous auriez eu "du plaisir" en la compagnie de saint Paul ? Croyez-vous que vous vous seriez "bien entendu" avec Sir Galahad ? Il en va des pécheurs comme des saints. Si vous rencontriez un vrai pécheur, et que vous reconnaissiez le péché en lui, il est certain que vous seriez frappé d'horreur. Mais il n'y aurait peut-être aucune raison pour que cet homme vous "déplaise". Au contraire, il est fort possible que si vous parveniez à oublier son péché, vous trouveriez son commerce agréable. Et pourtant !... Non, personne ne peut deviner combien le vrai mal est terrifiant!... Si les roses et les lis de ce jardin chantaient soudain dans ce matin naissant, si les meubles de cette maison se mettaient à marcher en procession, comme dans le conte de Maupassant !
- Je suis content que vous reveniez à cette comparaison, dit Cotgrave, car je voulais vous demander à quoi correspondent, dans l'humanité, ces prouesses imaginaires des choses dont vous parlez. Encore une fois, qu'est-ce donc alors que le péché? J'aimerais enfin un exemple concret. »

Pour la première fois, Ambrose hésita :
« Je vous l'ai dit, le vrai mal est rare. Le matérialisme de notre époque, qui a beaucoup fait pour supprimer la sainteté, a peut-être fait plus encore pour supprimer le mal. Nous trouvons la terre si confortable que nous n'avons envie ni de monter ni de descendre. Tout se passe comme si le spécialiste de l'Enfer en était réduit à des travaux purement archéologiques.
- Pourtant, il paraît que vos recherches se sont étendues jusqu'à l'époque présente ?
- Je vois que vous êtes réellement intéressé. Eh bien, je confesse que j'ai en effet réuni quelques documents... »


FIN - quel salaud ! machen - Introduction à "The White People", par Arthur Machen 24455

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Laogorus

Laogorus


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Date d'inscription : 08/11/2008

machen - Introduction à "The White People", par Arthur Machen Empty
MessageSujet: Re: Introduction à "The White People", par Arthur Machen   machen - Introduction à "The White People", par Arthur Machen Empty24/9/2010, 18:13

    Eh bé ...
    Je préfère rester avec les croûtes de pain et l'eau fraîche. Neutral

L sunny
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http://ccreest.voila.net/
 
Introduction à "The White People", par Arthur Machen
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